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Comment garantir la transparence des élections au Tchad ?

Blaise Dariustone
2 mai 2024

Comment garantir la transparence de l'élection présidentielle du 6 mai au Tchad et comment faire pour éviter une diffusion incontrôlée des informations issues des bureaux de vote ?

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Le code électoral ne prévoit ni l’affichage des procès-verbaux de dépouillement dans les bureaux de vote, ni leur remise aux mandataires des candidats
Le code électoral ne prévoit ni l’affichage des procès-verbaux de dépouillement dans les bureaux de vote, ni leur remise aux mandataires des candidatsImage : Alexis Passoua

Depuis le 14 Avril, les dix candidats en lice sont en campagne partout dans le pays. Mais une partie de l'opinion accuse l'agence nationale de gestion des élections (Ange) de mettre en place des manœuvres de manipulation de résultats. A l'origine, l'interdiction faite aux délégués des bureaux de vote et aux électeurs, de photographier les procès-verbaux à la fin des opérations de vote.

L'agence nationale de gestion des élections (Ange) justifie l'interdiction de photographier les procès-verbaux des bureaux de vote par les électeurs ou délégués des bureaux, par le souci d'éviter toute publication de ces documents sur les réseaux sociaux.

L'agence électorale interdit la photographie des PV du scrutin

L'agence électorale dit craindre que son travail soit mis à mal et qu'une publication non contrôlée des procès-verbaux provoque des conflits.

Ahmed Batchiret président de l'organe chargé de la gestion des élections met en garde ceux qui s'hasarderaient à publier les resultats dans les reseaux sociaux. 

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"Aujourd'hui, on sait comment on peut manipuler les chiffres à travers les réseaux sociaux donc il faut faire très attention. J'attire l'attention des uns et des autres d'éviter de donner des résultats fantaisistes à travers les réseaux sociaux pour revendiquer une victoire, etc...'', previent Batchiret. 

''Cela serait extrêmement grave et ces gens qui veulent vont engager leur responsabilité. S'ils se hasardent à le faire, ils auront à faire à la loi", a-t-il menacé. 

Mais ces explications sont loin de convaincre la société civile tchadienne. Pour celle-ci, la décision de l'organe de gestion des élections est en totale contradiction avec l‘article 9 de la Constitution qui dit et je cite : "les candidats, les partis politiques en compétition ont le droit d'accéder au fichier des résultats par bureau de vote tenu par l'Ange", fin de citation.

Un recul démocratique ?

Ce n’est pas l’Ange qui a élaboré le code électoral, mais l’Ange est chargée de sa stricte application, affirme l'agence electorale
Ce n’est pas l’Ange qui a élaboré le code électoral, mais l’Ange est chargée de sa stricte application, affirme l'agence electoraleImage : Alexis Passoua

Ildjima Lokiam Agnès, qui dirige un réseau d'organisations de la société civile pour l'observation électorale, rejette les arguments du président de l'Ange, Ahmet Batchiret.

"Nous parlons d'une élection libre et transparente, alors la transparence c'est justement là où les gens peuvent filmer les procès-verbaux. Surtout les délégués des bureaux de vote doivent filmer les procès-verbaux si nous sommes vraiment dans la transparence comme on le dit. Mais là, on le leur interdit et nous trouvons que c'est une atteinte au droit des candidats. Il y a un peu de recul dans notre démocratie.", regrette Lokiam

Il peut arriver, que certains candidats jugent les résultats publiés par l'organe électoral non-conformes à ceux prélevés dans les bureaux de vote. Dans ce cas, les procès-verbaux qui contiennent les données sensibles tel que le nombre de suffrages obtenus par les candidats, servirait de preuve. Or si le code électoral interdit de les photographier, il serait difficile d'apporter des preuves, et c'est tout l'enjeu de la polémique.

''Une fois affichés, les résultats tombent dans le domaine du public''

Dernière ligne de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle du 6 mai
Dernière ligne de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle du 6 maiImage : Alexis Passoua

Christian Baidessou, expert tchadien des questions électorales condamne lui aussi la décision de l'agence électorale. 

"Une fois affichés, les résultats tombent dans le domaine public et peuvent être repris aussi bien par les électeurs que par les délégués et candidats auxquels l'Ange n'a pas prévu de remettre des copies des procès-verbaux alors même qu'ils en sont signataires.'', dit Baidessou. 

Et d'ajouter : ''Les candidats qui en ont les moyens peuvent mettre en place un dispositif de collectif des résultats affichés devant les 26 611 bureaux de vote pour se faire une idée des voix qu'ils ont obtenues. C'est là toute la maladresse de la communication et de la décision de l'Agence nationale de de gestion des élections".

Pour certains analystes, c'est un début de fraude électorale. Car, à travers cette décision, l'agence nationale chargée de la gestion des élections veut priver les candidats de toutes possibilités de disposer de preuves pour étayer leurs contestations devant le Conseil constitutionnel.